Angle mort

Publié le par Jacquette

L’angle mort, c’est là où on ne te voit pas, là où tu peux regarder sans être vu, une poche d’invisibilité. Tu regardes la vie, mais tu ne t’impliques pas.

C’est le héros de notre film, un beau gars charmant et drôle, qui ne se livre jamais totalement, c’est une anguille, toujours dans l’esquive, un enfant jamais devenu adulte, quelqu’un qui n’entre pas dans son destin.

Dans la pénombre de son don d’invisibilité, il regarde la vie défiler, mais il reste toujours de côté, un peu absent à lui-même, observateur impuissant.

Un homme empêché, empêtré dans son don, qui ne lui sert qu’à s’effacer un peu plus d’une vie à peine assumée. Tandis que son copain d’enfance, partageant le même don, cherche désespérément à « faire quelque chose » avant que ce don ne lui échappe, l’interpellant d’une façon pesante pour qu’ils s’associent dans un exploit quelconque, le héros, lui, continue d’éviter la réalité et toute forme d’engagement affectif ou professionnel.

Peu à peu, il ne maîtrise plus ce pouvoir si encombrant, dont on perçoit l’aspect angoissant et futile à la fois à travers ce personnage solitaire dans son secret. Il lui faudra apprendre à assumer sa vie, faire des choix, être présent et visible aux yeux du monde.

Apparaître à soi-même et aux autres, dans sa plénitude d’homme, oser par exemple jouer de la guitare, comme son père infidèle et absent, être responsable de sa vie, ne pas seulement paraître ce garçon charmant mais insaisissable, se cachant au sous sol de son boulot pour préparer les instruments des « vrais » musiciens et évitant toute responsabilité.

 

J’ai été touchée par cette adaptation de « l’homme invisible » de H.G.Wells, qui ne se cantonne pas à l’aspect fantastique du sujet, mais qui souligne plutôt la désespérance de cette situation, cette solitude, cette inadéquation à la vie réelle que procure ce don au héros, ce don qui nous fait rêver comme des gamins, mais qui n’est plus qu’un pénible secret pour le personnage, le rendant inapte, comme « handicapé », face à l’amour, le partage, l’engagement.

 

L’angle mort, il ne faudrait pas y disparaître définitivement.

 

"L'angle mort" un film de Patrick Mario-Bernard et Pierre Tridivic

Reflet du monde dit "réel"...

Reflet du monde dit "réel"...

Publié dans cinéma,, existence

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