Vie de banlieue

Publié le par Jacquette

Gaillardement je trace sac au dos dans la banlieue plombée, un matin de janvier. Le soleil a- t- il jamais existé ? Mais si, hier il faisait un grand ciel bleu et zéro degré, il faut choisir, se geler en lumière ou prendre un bain de bruine sous ciel bas pour quelques degrés de plus.

Donc me voilà guillerette (j ‘ironise, là) dans le quotidien de ménagère que je ne suis guère (remarquez la rime involontaire), partie à la médiathèque toute neuve et quasi luxueuse, plantée au milieu de la cité, vaillant espace de culture dans ce ghetto, puis un tour à la boulangerie délicieuse, quand soudain je me retrouve cernée par un gang de poussettes à double ou triple sièges, plus un ou deux minuscules lardons qui s’accrochent sur le côté. Une sortie en masse des nounous, avec leur petites tribus de pioupious. C’est qu’on repeuple la France par ici, les mamans travaillent en femme indépendante et puis il faut payer le crédit de l’appartement tout neuf, acheté dan l’un de ces immeubles de moyen standing qui poussent tel des champignons par ici. Ça fait du boulot pour celles qui ne sont ni cadres ni diplômées, LA NOUNOU indispensable, certifiée, adoubée par la municipalité, qui garde les petits car des crèches il n’ y en a pas assez, on construit à toute blinde, les haltes garderies ça viendra plus tard, c’est comme le métro, en chantier depuis deux ans pour encore trois ans, imaginez la montée des prix de l’immobilier ces temps ci…Bon , je m’égare, une petite bouffée anxiogène , tous ces marmots !

 

Qu’il est doux et convivial ( encore de l’ironie!) de passer une demi heure à tirer des photos dans le seul et unique hyper de cette charmante ville du 93. C’est un petit théâtre du monde populaire, où les vieux se retrouvent après leurs emplettes, on se claque la bise avant d’aller à la réunion des seniors pour tirer la galette. Un caissier antillais fait ambianceur à lui tout seul, beaucoup de femmes viennent à sa caisse pour sa faconde, on se souhaite la bonne année, et comment ça va ? Des types en tenue de chantier achètent boite de pâté et baguette pour la pause, les gitanes en robe longue et pantoufles oublient toujours de prendre un panier, un couple de vieux fait le plein de danettes et de saucisses, on voit que la femme est plus alerte, le monsieur arrive à peine à pousser le caddy avec l’air égaré, tandis qu’elle fait chauffer la carte bleue. Un petit groupe de gamins, on est mercredi, passent les mains dans les poches devant la caisse, l’air dégagé, et vont dans l’épicerie en face, plus de choix de bonbons peut être ?

Oui, un petit théâtre drôle et pathétique, loin de l’épicerie bio pour les nouveaux habitants, ça sent la pauvreté, les fins de mois difficiles, le pavillon délabré, la toute petite retraite, sous l’éclairage brutal des néons, avec la blouse rouge des caissières et les annonces de promos bidons…

Comment dire, ce n’est pas propice à l’optimisme cet univers, bien réel, celui des classes dites « défavorisées », reléguées à la périphérie des grandes villes, bientôt ils devront encore s’éloigner, parce que le grand Paris n’est pas à la portée de leurs moyens...

Ici, peu iront gueuler contre la réforme des retraites, on essaie de garder son boulot malgré la grève des transports, si on en a un, familles monoparentales, immigrés, ouvriers sur les chantiers, retraités modestes, vieux chibanis, gitans ou roms, on vit à l’ombre de la capitale, sans trop de bruit, et sans illusions, « déjà que les jeunes font des bêtises », on supporte la vie telle qu’elle vient…

De toutes façons, « ils font ce qu’ils veulent, les politiques, nous on compte pas... »

 

Tourner le dos à la grisaille....Ouvrir ses ailes enfin!

Tourner le dos à la grisaille....Ouvrir ses ailes enfin!

Publié dans Humeur, existence, socièté

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