rêverie parmi les géants

Publié le par Jacquette

nature primitive...

nature primitive...

Dans la pénombre, une forêt de totems primitifs, tambours géants, arbres entiers évidés pour appeler les esprits, têtes au regard indicible, piliers de plusieurs mètres où sont sculptées des silhouettes humaines, accumulées comme une échelle pour atteindre l’au delà, afin d’échanger avec les morts, les ancêtres . Murmures, dialogues en idiomes inconnus, percussions et chants assourdis, alvéoles où se nicher pour comprendre la préparation des morts pour le bûcher où les corps sont brûlés, le rituel des peintures pour partir à la chasse, la conception de la maison des ancêtres : dans ces tribus dites « primitives », on célèbre sans cesse les morts, on les invite à sa table, on leur construit une maison sacrée, on raconte leur épopée, on ritualise chaque événement de la vie, naissance, initiation à l’âge adulte, mariage, chasse , combat, et la mort n’est jamais une fin ou un tabou, tout est magie, dialogue avec les forces de la nature. On se sent tout petit devant cette beauté brute, cette foi et cette terreur sacrée qui habitent ces peuples de guerriers, nus dans la forêt avec leur sagaie et leurs chants pour traquer l’animal qui leur permettra de nourrir leur village. Toutes ces parures, ces masques, ces bracelets de coquillages, ces lances sculptées, ces colliers de dents et de plumes, autant d’heures passées à produire de la beauté, , pour orner les fiers visages et les poitrines des guerriers, les bras et les cheveux des femmes et des hommes, tisser ces liens de génération en génération, des vivants vers les morts, des morts avec les dieux. Cette quête de sacré, cette interrogation permanente des hommes envers les éléments qui les entourent, ce besoin de récits, de mythes, voilà qui occupait toute notre espèce...peut on encore se représenter cette quête dans une nature généreuse et indomptée, nous qui vivons dans de petites boites, roulons dans de petites boites et finissons dans une petite boite ?

Nous n’imaginons plus rien, car tout a été expliqué, rationalisé, organisé, nous naissons dans un monde sans mystère ni magie, nous ne fabriquons plus rien de nos mains, nous ne savons quasiment rien réparer, puisqu’on peut jeter et racheter la même chose pour « encore moins cher ».

Bien sûr nous avons besoin de beauté, d’histoires et de légendes pour survivre dans nos boites ; footballeurs et stars de cinéma, gagner beaucoup d’argent et rester toujours jeune et beau, faire un selfie avec une vedette, passer à la télé...Ca fait pas rêver ça ?

Le grand mythe est devenu le cauchemar en temps réel, puisque le changement climatique dû à l’impact de notre consommation effrénée nous conduit droit dans le mur.

Vite vite je tapote sur mon ordi, mon smartphone, mon compte face2bouc etc.

« sauvons les abeilles » « ne mangez plus de viande » « roulez en vélo » « n’achetez plus en grande surface » « marchons pour le climat », pendant ce temps, ça se réchauffe grave.

Et si je bosse dans un abattoir ? Si je bosse dans une grande surface ? Si j’ai une vieille caisse qui roule au diesel ?

Moi aussi je veux faire un selfie avec le dernier smartphone en vogue, m’acheter les mêmes pompes que Rihanna, (mais fabriquées en Chine, c’est moins cher), aller au Macdo avec mes potos, pourquoi ça serait toujours aux mêmes de faire pénitence, «  la France de la périphérie » comme disent les médias, nouveau terme pour vieille antienne, les territoires ruraux, les déclassés du progrès, parce que le progrès maintenant c’est retour à la charrette, légumes du fermier voisin (mais le fermier s’est suicidé, trop de dettes et pas assez de production intensive), et la dernière ligne de train vient de fermer, pas assez rentable, donc il faut prendre sa voiture pour le centre commercial à 20 bornes, dans les villages il n’y a plus d’épicerie ni boulangerie,tout se bétonne de façon bien concentrée, on va mettre trois arbres et une boite pour les insectes là, ça fait plaisir aux amoureux de la nature….

Et un vélo avec une charrette, pour aller au centre commercial, ça serait pas possible ?

Respirez un bon coup dans un couloir de métro, et venez me parler de transport en commun comme lutte contre la pollution….

Moi je retourne rêver près des géants en bois...

Au musée Branly, section arts d'Océanie

Publié dans société, Humeur, existence, art

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